- Aude Richard
- 10 oct. 2020
- 3 min de lecture
Tout s'est précipité cette année, on le savait très bien, les vignes étaient en avance depuis le début du printemps mais cela nous a surpris de vendanger les blancs à la fin du mois d'août.
C'est du jamais vu ! Cela n'était JAMAIS arrivé avant. Chaque année c'est de plus en tôt.
C'est normal ?! NON
Mais que peut on y faire ?!
Comment s'adapter à ces changements climatiques ?
Quels nouveaux cépages pourrait on planter ?
En quelques mots, voici ce qu'a induit la météo de cette année sur notre millésime en cours de vinifications :
- Un hiver trop doux : la vigne n'est pas vraiment rentrée en dormance.
- Un printemps précoce et très pluvieux : le débourrement des bourgeons s'est fait avec plus de 15 jrs d'avance. La pression Mildiou et Oïdium a été très forte, il a fallu traiter très régulièrement sans dépasser les doses de cuivre autorisées en associant des tisanes de plantes.
- Un été trop chaud et trop sec : pas de pluie pendant 2 mois.
Résultat : nous avions eu fin juillet la confirmation de l'avance de maturité des raisins sur la saison.
Le manque d'eau et les grosses chaleurs ont déshydraté les raisins qui ne se sont pas gonflés d'eau : il en a découlé que les sucres se sont concentrés, concentrés, concentrés ...
Bref, pour tout vous dire, je ne faisais pas la fière quand j'ai vu les degrés potentiels de nos cuves avant fermentation ! Le potentiel minimum était de 14 %vol d'alcool sur une cuve et de 16 %vol sur une autre.
Trop de degré d'alcool peut poser des problèmes :
Les levures naturelles des raisins ne supportent pas plus de 14.5-15 % vol : au delà elles meurent et la fermentation s'arrête alors qu'il reste des sucres dans le vin :
- Soit on la laisse prendre son temps de finir les sucres pour que le vin soit "sec" avec les quelques levures résistantes, il faut une température idéale de 21-22°C cela peut prendre des mois,
- Soit on peut ré-ensemencer avec des levures du commerce (par dérogation) mais c'est pas l'idée ici.
(pour tout vous dire certaines cuves 2019 ne les ont pas encore terminés ...)
Une seconde fermentation (malolactique), par des bactéries cette fois, se fait dans les mois suivants . S'il reste des sucres dans nos vins que nous n'avons pas sulfités, les bactéries vont s'en donner à coeur joie en dévorant les sucres et les transformant en acide acétique = vinaigre
Vinifier un millésime à fort degré, c'est beaucoup de contraintes au chai et je suis d'autant plus consciente que les consommateurs ne seront pas forcément satisfaits de ce degré élevé et comme je ne rajoute pas d'eau dans mon vin celui ci a de plus en plus d'alcool au fil des ans : cela devient vraiment problématique.
Je pense qu'il est grand temps de réfléchir à l'avenir
de la vigne et du vin dans notre région...
En attendant, voici un diaporama de nos vendanges et vinifications suivis de vidéos :
On vous explique tout sur notre cuvée Prestige 2020 :
Quelques jours après le début de la fermentation, nous avons compris qu'il y avait un souci au coeur de la cuve, nous avons passé plusieurs heures à travailler sur le problème (physiquement) mais au matin du 6ème jour de cuvaison, en pleine fermentation nous avons du vider entièrement la cuve pour sauver le vin car le marc était en train de se piquer...
Notre déduction : une erreur a été faite lors du foulage (vidéo ci dessus), c'était une première pour nous et nous manquions d'expérience : les bottes aux pieds de notre stagiaire ont aplati les raisins et ont créé des couches comme des lasagnes entre lesquels le marc n'était pas immergé...
Ca nous sert de leçon si l'on doit recommencer un jour .
En attendant nous avons sauvé notre cuvée qui se révèle excellente !
Les fermentations sont quasiment terminées sur les autres cuves, il reste encore quelques sucres mais il ne fait pas encore trop froid pour les stopper complètement, je croise les doigts !
